spectacle "CANNES-POESIE"
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16 MARS 2024 :
square Taras Chevtchenko
cliquez sur une photo pour découvrir le concert
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Le groupe « bluesy-poesy"» s’est donné pour mission
de faire "un live" sur scène, en associant les meilleurs textes
des poètes classiques Français,
à des musique modernes toutes originales,
Plusieurs chanteurs se succèdent :
les uns sont des « Slammeurs » les autres
chantent les textes des poètes.
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21 juin 2021 concert Nice "La Provence"
"à une passante" Charles Baudelaire
Voici un poème de Charles Baudelaire écrit en 1861, dans le second carnet des fleurs du mal ; « Les tableaux Parisiens » ; ce texte raconte la fugitive rencontre entre Le poète et une jolie femme inconnue qui croise son regard dans la rue. : de cette fugitive et soudaine entrevue naît un véritable « coup de foudre » mais a sens unique seulement : le poète est littéralement « scotché » par la vision de cette femme : c’est sans espoir et sans lendemain bien sur : le caractère éphémère et sans avenir de cette rencontre laissera Baudelaire seul et désemparé.
"La rue assourdissante autour de moi hurlait : longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse, une femme passa, d'une main fastueuse, soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;
Agile et noble, avec sa jambe de statue. moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan, la douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté, dont le regard m'a fait soudainement renaître, ne te verrai-je plus que dans l'éternité ? ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être ! Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais, Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais !"
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"dix sept ans" ("roman") : Arthur Rimbaud
Quelle bizarre idée cher Arthur Rimbaud d’avoir intitulé ton poème : « roman »Quel titre curieux pour un si petit poème !
Peut-être voulait-tu dire « roman d’amour » ou bien « romance? »
Et cela se passe l’été : l’été c’est la saison des amours pour les oiseaux comme pour les adolescents et Arthur nous raconte son amour d’été
On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans.− Un beau soir, foin des bocks et de la limonade, des cafés tapageurs aux lustres éclatants !
On va sous les tilleuls verts de la promenade. Les tilleuls sentent bon dans les bons soirs de juin, !’air est parfois si doux, qu’on ferme la paupière ; Le vent chargé de bruits, − la ville n’est pas loin -, a des parfums de vigne et des parfums de bière… − Voilà qu’on aperçoit un tout petit chiffon D’azur sombre, encadré d’une petite branche, piqué d’une mauvaise étoile, qui se fond ,avec de doux frissons, petite et toute blanche…Nuit de juin ! Dix-sept ans ! – On se laisse griser. La sève est du champagne et vous monte à la tête…On divague ; on se sent aux lèvres un baiser qui palpite là, comme une petite bête…Le cœur fou Robinsonne à travers les romans, − Lorsque, dans la clarté d’un pâle réverbère, passe une demoiselle aux petits airs charmants, sous l’ombre du faux-col effrayant de son père…Et, comme elle vous trouve immensément naïf, Tout en faisant trotter ses petites bottines,Elle se tourne, alerte et d’un mouvement vif…− Sur vos lèvres alors meurent les cavatines… Vous êtes amoureux. Loué jusqu’à mois d’août. Vous êtes amoureux. − Vos sonnets La font rire. Tous vos amis s’en vont, vous êtes mauvais goût. Puis l’adorée, un soir, a d aigné vous écrire… !− Ce soir-là,… − vous rentrez aux cafés éclatants, Vous demandez des bocks ou de la limonade… On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans Et qu’on a des tilleuls verts sur la promenade.
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"spleen " : Charles Baudelaire
D'humeur dépressive, Charles Baudelaire effectue plusieurs tentatives de suicide, fort heureusement avortées. . Il se donnera un coup de couteau en 1845, auquel il survivra : Il a alors 24 ans et vivra encore 22 années. son état «dépressif il le nomme « spleen » qui est un mot anglais qui , curieusement signifie « la rate » : . Le spleen est le grand mal qui préoccupe les Romantiques. Il renvoie au mal-être causé par la condition humaine, sorte de fatalité propre à l'homme et à la vie. Dans Les Fleurs du Mal, Quatre poèmes portent le nom de Spleen. Voici le dernier des quatre et c’est peut-être le plus terrible, le plus angoissant, délirant, dément.
Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis, Et que de l'horizon embrassant tout le cercle
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ; Quand la terre est changée en un cachot humide, Où l'Espérance, comme une chauve-souris, S'en va battant les murs de son aile timide et se cognant la tête à des plafonds pourris;
Quand la pluie étalant ses immenses traînées D'une vaste prison imite les barreaux, et qu'un peuple muet d'infâmes araignées vient tendre ses files au fond de nos cerveaux, Des cloches tout à coup sautent avec furie et lancent vers le ciel un affreux hurlement, Ainsi que des esprits errants et sans patrie
qui se mettent à geindre opiniâtrement. - Et de longs corbillards, sans tambours ni musique, Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir, Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,
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"Conseil tenu par les rats" Jean de la Fontaine
Conseil tenu par les Rats met en scène un groupe de rats opprimé par un chat qui décime leur population. Les rats décident donc d'attacher une sonnette au cou du chat pour pouvoir l'entendre arriver et fuir lorsque celui-ci s'approche. Par ce récit sous forme d'apologue, La Fontaine montre les difficultés de mettre en pratique les décisions prises et fait ainsi la satire des beaux parleurs et de la Cour.
Un Chat, nommé Rodilardus, faisait des Rats telle déconfiture Que l’on n’en voyait presque plus, tant il en avait mis dedans la sépulture. Le peu qu’il en restait, n’osant quitter son trou, ne trouvait à manger que le quart de son sou, et Rodilard passait, chez la gent misérable, non pour un Chat, mais pour un Diable. Or un jour qu’au haut et au loin l e galant alla chercher femme, pendant tout le sabbat qu’il fit avec sa Dame, le demeurant des Rats tint chapitre en un coin sur la nécessité présente. dès l’abord, leur Doyen, personne fort prudente, opina qu’il fallait, et plus tôt que plus tard, attacher un grelot au cou de Rodilard ; Qu’ainsi, quand il irait en guerre, de sa marche avertis, ils s’enfuiraient en terre ; Qu’il n’y savait que ce moyen, chacun fut de l’avis de Monsieur le Doyen, Chose ne leur parut à tous plus salutaire. la difficulté fut d’attacher le grelot. L’un dit : « Je n’y vas point, je ne suis pas si sot »; L’autre : « Je ne saurais. »Si bien que sans rien faire On se quitta. J’ai maints Chapitres vus, Qui pour néant se sont ainsi tenus ; Chapitres, non de Rats, mais Chapitres de Moines, Voire chapitres de Chanoines. Ne faut-il que délibérer, La Cour en Conseillers foisonne ;
Est-il besoin d’exécuter, L’on ne rencontre plus personne.
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"le mot " Victor Hugo
Victor Hugo est passé maître dans l'art de mettre en valeur la puissance des mots. il est l'un de ceux qui perçoivent le mieux l'immense pouvoir de la parole humaine : en effet, Quel pouvoir , quelle puissance est contenue dans un seul mot ! le moindre mot désagréable même simplement pensé fait des ravages en nos coeurs… Un seul mot désagréable de trop et c’est la guerre que l’on déclare. ! Ecoutez bien : les alexandrins du poème de Victor Hugo « le mot » nous percutent strophe après strophe et le rythme qui scande le discours est parfaitement génial !
Braves gens, prenez garde aux choses que vous dites !Tout peut sortir d'un mot qu'en passant vous perdîtes. Tout, la haine et le deuil !Et ne m'objectez pas que vos amis sont sûrs et que vous parlez bas.
Écoutez bien ceci :Tête à tête, porte close, chez vous, sans un témoin qui souffle, Vous dîtes à l'oreille du plus mystérieux de vos amis de cœur Vous murmurez tout seul, croyant presque vous taire,
Dans le fond d'une cave à trente pieds sous terre Un mot désagréable à quelque individu.
Ce mot, que vous croyez que l'on a pas entendu, Que vous disiez si bas dans un lieu sourd et sombre, Court à peine lâché, part, bondit, sors de l'ombre. Tenez, il est dehors ! Il connait son chemin;
II marche, il a deux pieds, un bâton a la main, De bons souliers ferrés, un passeport en règle;
Au besoin, il prendrait des ailes comme l'aigle! II vous échappe, il fuit, rien ne l'arrêtera; II suit le quai, franchit la place, et cætera, Passe l'eau sans bateau dans la saison des crues, Et va, tout à travers un dédale de rues Droit chez le citoyen dont vous avez parlé. II sait le numéro, l'étage : il a la clef,
Il monte l'escalier, ouvre la porte, passe, Entre, arrive, et, railleur, regardant l'homme en face,
Dit : "Me voila ! Je sors de la bouche d'un tel".Et c'est fait. Vous avez un ennemi mortel.
"Le serpent qui danse" Charles Baudelaire
Jeanne Duval, la muse haïtienne de Charles Baudelaire, la mulâtresse venue d’un pays lointain, inspira ce texte au poète : Toute la femme est mise en valeur dans ce poème
sa chevelure, ses yeux, sa démarche, sa tête, sa bouche, enfin son corps tout entier.
Satan n’est pas loin et , dans ce XIXe siècle puritain, ce poème lui vaudra un procès pour « immoralité » lors de la publication des fleurs du mal.
Que j'aime voir, chère indolente, De ton corps si beau,Comme une étoffe vacillante, Miroiter la peau !
Sur ta chevelure profonde Aux âcres parfums, Mer odorante et vagabonde Aux flots bleus et bruns,
Comme un navire qui s'éveille Au vent du matin, Mon âme rêveuse appareille Pour un ciel lointain.
Tes yeux, où rien ne se révèle De doux ni d'amer, Sont deux bijoux froids où se mêle L'or avec le fer. A te voir marcher en cadence, Belle d'abandon, On dirait un serpent qui danse Au bout d'un bâton. Sous le fardeau de ta paresse Ta tête d'enfant Se balance avec la mollesse D'un jeune éléphant, Et ton corps se penche et s'allonge Comme un fin vaisseau Qui roule bord sur bord et plonge Ses vergues dans l'eau. Comme un flot grossi par la fonte Des glaciers grondants,
Quand l'eau de ta bouche remonte Au bord de tes dents Je crois boire un vin de Bohême Amer et vainqueur, Un ciel liquide qui parsème D'étoiles mon coeur !
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"Hymne à la beauté" Charles Baudelaire
Bien sûr, Tous les poètes ont loué la beauté féminine mais Baudelaire va plus loin , il écrit son « hymne à la beauté »
ce qui est en quelque sorte le superlatif des hommages à la beauté féminine. Ce poème est dédié à Jeanne Duval, cette jeune métisse avec laquelle il connaîtra les délices et les amertumes de la passion
Dans ce poème la beauté absolue s’impose totalement à l’homme :
toute résistance est vaine : c’est la beauté du diable qui va l’entraîner parfois vers le mal et le démon
Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l'abîme, Ô Beauté ! ton regard, infernal et divin,
Verse confusément le bienfait et le crime, Et l'on peut pour cela te comparer au vin.
Tu contiens dans ton oeil le couchant et l'aurore ; Tu répands des parfums comme un soir orageux ;
Tes baisers sont un philtre et ta bouche une amphore Qui font le héros lâche et l'enfant courageux.
Sors-tu du gouffre noir ou descends-tu des astres ? Le Destin charmé suit tes jupons comme un chien ; Tu sèmes au hasard la joie et les désastres, Et tu gouvernes tout et ne réponds de rien.
Tu marches sur des morts, Beauté, dont tu te moques ; De tes bijoux l'Horreur n'est pas le moins charmant, Et le Meurtre, parmi tes plus chères breloques, Sur ton ventre orgueilleux danse amoureusement. L'éphémère ébloui vole vers toi, chandelle, Crépite, flambe et dit : Bénissons ce flambeau ! L'amoureux pantelant incliné sur sa belle A l'air d'un moribond caressant son tombeau.
Que tu viennes du ciel ou de l'enfer, qu'importe, Ô Beauté ! monstre énorme, effrayant, ingénu !
Si ton oeil, ton souris, ton pied, m'ouvrent la porte D'un Infini que j'aime et n'ai jamais connu ?
De Satan ou de Dieu, qu'importe ? Ange ou Sirène, Qu'importe, si tu rends, - fée aux yeux de velours,
Rythme, parfum, lueur, ô mon unique reine ! - L'univers moins hideux et les instants moins lourds ?
"mes souvenirs" Charles Baudelaire
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Nietzsche, Glorifiait l’oubli comme condition de la vie : l’excès de mémoire, fait obstacle au mouvement de la vie et menace l’essor de la civilisation. Baudelaire, pour sa part considère que la mémoire est cause de spleen. L’excès de souvenirs provoque un ennui profond chez le poète, ennui qui finit par le conduire à la pensée de la mort.
J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans. Un gros meuble à tiroirs encombré de bilans,
De vers, de billets doux, de procès, de romances, Avec de lourds cheveux roulés dans des quittances, Cache moins de secrets que mon triste cerveau. C'est une pyramide, un immense caveau, Qui contient plus de morts que la fosse commune. Je suis un cimetière abhorré de la lune,
Où comme des remords . se traînent de longs vers Qui s'acharnent toujours sur mes morts les plus chers. Je suis un vieux boudoir plein de roses fanées, Où gît tout un fouillis de modes surannées,
Où les pastels plaintifs . et les pâles Boucher, Seuls, respirent l'odeur d'un flacon débouché.
Rien n'égale en longueur les boiteuses journées, Quand sous les lourds flocons des neigeuses années
L'ennui, fruit de la morne incuriosité, Prend les proportions de l'immortalité. Désormais tu n'es plus, GG ô matière vivante ! Qu'un granit entouré GG d'une vague épouvante, Assoupi dans le fond GG d’un Saharah brumeux ; Un vieux sphynx ignoré d’un GG monde insoucieux, Oublié sur la carte, et GG dont l'humeur farouche Ne chante qu'aux rayons GG du soleil qui se couche.
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"duel dans la clairière" Charles Cros
Duel : Autrefois, les duels entre femmes n'étaient pas si rares et certaines femmes ont marqué les esprits. La plus connue est sans doute la cantatrice Julie d'Aubigny dite La Maupin (1670-1707) dont les prouesses ont défrayé la chronique et inspiré de nombreux écrivains (dont Théophile Gautier). Son éducation masculine lui permit d'apprendre l'escrime et même d'en faire son gagne-pain pour un temps. Ses duels se terminaient souvent dans le sang si bien que Mademoiselle Maupin dut quitter la France et se réfugier à Bruxelles. Maupin était une Sapho, sinon dans son esprit, du moins dans ses mœurs, et elle avait l'effronterie d'en tirer vanité. Se trouvant un jour dans un bal, elle se permit envers une dame, d'indécentes agaceries. Trois cavaliers, qui accompagnaient cette dernière, voulurent en vain la faire cesser ; elle les provoqua, les força de sortir avec elle, et les tua tous les trois. Après cette expédition, elle rentra fort tranquillement dans la salle de bal !...-
Pour plus d'agilité, pour le loyal duel, Les témoins ont jugé, qu'elles se battraient nues.
Les causes du combat resteront inconnues. Les deux ont dit : Motif tout individuel.
La blonde a le corps blanc, plantureux, sensuel ; Le sang rougit ses seins blancs et ses lèvres charnues.
La brune a le corps d'ambre et des formes ténues ; Les cheveux noirs-bleus font ombre au regard cruel.
Cette haie où l'on a jeté chemise et robe, Ce corps qui tour à tour s'avance ou se dérobe,
Ces seins dont la fureur fait se dresser les bouts, Ces battements de fer, ces sifflantes caresses,
Tout paraît amuser ce jeune homme à l'oeil doux Qui fume en regardant se tuer ses maîtresses.
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